jeudi 5 avril 2012

Imbogodom : "And They Turned Not When They Went" (Thrill Jockey, 2012)


Il y a de ces artistes qu'on découvre en début de carrière; qu'on suit pendant un bout de temps et qui finissent par nous lasser... On se tourne alors vers autre chose. En fait, rares sont ceux qui parviennent à capter notre intérêt et à se renouveler de disques en disques. Cette réussite est le lot d'une minorité. J'ai découvert Alexander Tucker avec son premier disque paru sur le label ATP: "Old Fog", paru en 2006. Ce n'est pas un album qui m'a jeté par terre, simplement intrigué. Un curieux mélange de folk, de renouveau médiéval et de grosses distorsions. Un mélange qui s'est affiné avec les années et les parutions. Son plus récent album solo, "Dorwytch" paru sur Thrill Jockey l'année dernière a confirmé pour plusieurs observateurs de la scène expérimentale, le statut et le talent particulier d'auteur/compositeur de Tucker, en exploitant ses tendances progressives médiévales à travers ses constructions musicales.



À cet effet, je regrette de ne pas avoir lu le livre "Electric Eden" du journaliste musical Rob Young. Dans ce livre, l'auteur resitue une résurgence des chants païens et médiévaux aux travers de la musique folk britannique. Une espèce de retour du refoulé, éteint par la religion catholique protestante pendant des siècles. Ce qui nous entraîne dans ce plus récent disque d'Alexander Tucker.



Imbogodom est un duo de Tucker avec le néo-zélandais Daniel Beban. Les deux se sont rejoints sur un premier effort paru en 2010, encore sur Thrill Jockey. "The Metallic Year" ne m'avait pas vraiment interpellé à sa sortie mais je risque de retourner m'y perdre prochainement. Sur le nouvel album, le duo semble explorer les mêmes pistes défrichées auparavant. Les deux m'apparaissent comme des explorateurs, voyageurs d'un monde onirique, où à la manière de psychanalystes, ils réinterprètent les contenus inconscients et les démons infantiles en fonction de leurs compromis fantasmatiques.Le statut onirique de cet album est probablement son aspect le plus intéressant. En tant qu'entrepreneurs du rêve, Beban et Tucker puisent leurs matériaux à différentes sources et procèdent à un tissage vaguement narratif avec une part d'incohérence. Les résidus diurnes sont incorporés à des souvenirs anciens qui tentent tant bien que mal de dissimuler des fantasmes phylogénétiques.Ceux-ci sont révélés par l'iconographie du disque; le serpent lové sur lui-même, un repli sur soi, permettant de se retrouver seul au centre de l'univers, pour pouvoir laisser libre cours à la jouissance déliée. Un étrange disque folk, expérimental, qui s'impose comme une mise en scène singulière de la pulsion de mort. Un de mes disques favoris sorti cette année.

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